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Le sigle DPS, pour Département Protection Sécurité, renvoie à une structure interne du Front National, aujourd’hui Rassemblement National, longtemps restée dans l’ombre du discours politique officiel mais bien connue des observateurs du mouvement. Le DPS n’est pas une entité gouvernementale, ni un service de sécurité classique. C’est, ou plutôt c’était, un dispositif partisan, composé de militants volontaires chargés d'assurer la sécurité des meetings, des personnalités du parti, et parfois même de surveiller les abords des rassemblements. Officiellement, une simple “logistique de sécurité”. Mais dans les faits, une organisation souvent perçue comme une milice.
On peut supposer que la création du DPS, dans les années 1980, répondait à une double nécessité : d’un côté, protéger les figures de proue du Front National, régulièrement prises pour cible dans un climat de tension politique ; de l’autre, affirmer une capacité à “tenir le terrain”, à se montrer discipliné, organisé, viril même, dans une logique très assumée de démonstration de force. Il ne s’agissait pas seulement d’éviter les débordements, mais aussi de montrer les muscles, subtilement ou non.
Le terme DPS a longtemps fait frissonner certains journalistes et adversaires politiques, tant il évoquait une forme de sécurité parallèle, avec ses codes, ses hiérarchies, ses méthodes. Il arrive qu’on l’associe à des figures marquées, souvent issues du monde militaire ou du sport de combat. Le style était reconnaissable : coupe courte, blouson noir, oreillette discrète. Certains diront que tout cela n’avait rien d’illégal. D’autres, au contraire, ont vu dans le DPS un risque de dérive, une ambiguïté volontairement entretenue entre encadrement militant et menace latente.
L’organisation a connu plusieurs polémiques, notamment à la fin des années 1990. Des reportages, des enquêtes journalistiques, des infiltrations ont mis au jour une culture interne faite de slogans identitaires, de références martiales, de discours parfois radicalisés. Le parti, sous la pression médiatique et judiciaire, a cherché à prendre ses distances. Mais on sentait bien que le DPS n’était pas un simple service d’ordre. Il y avait là une mise en scène de l’autorité, un goût certain pour la discipline virile, et un flou stratégique sur les limites de l’engagement.
Il faut dire que le DPS n’est pas un cas isolé dans le paysage politique français. D’autres partis ont eu, à des degrés divers, leurs propres services d’ordre, parfois très musclés. Mais la différence résidait dans le contexte idéologique. Dans un parti où l’ordre, l’identité, la force sont des valeurs cardinales, un Département Protection Sécurité ne peut pas être neutre. Il porte en lui une charge symbolique bien plus forte. Ce n’est pas une simple question de sécurité, mais de posture.
Le mot DPS a donc, pour beaucoup, cessé d’être un simple acronyme. Il s’est chargé d’un imaginaire. Celui des années sombres, des extrêmes, des récits de violence politique. Même si le RN a tenté de normaliser son image, de gommer les aspérités, de renvoyer le DPS à un passé révolu, l’ombre demeure. Le sigle continue d’apparaître dans certains récits, comme un vestige, un rappel. On ne l’emploie plus à la tribune, mais il n’a pas totalement disparu de la mémoire collective.
Il est difficile de dire précisément ce qu’est devenu le DPS aujourd’hui. Officiellement, il n’a plus d’existence. Mais il arrive que d’anciens membres revendiquent leur appartenance, leur passé au sein de cette structure. Pour certains, c’est une fierté. Pour d’autres, un poids. Il reste en tout cas un cas d’école dans l’histoire des partis politiques français : celui d’une structure interne, ni tout à fait publique ni complètement privée, mêlant engagement militant et logique de force.
Le mot, enfin, rappelle une tension ancienne : peut-on faire de la politique sans encadrement physique ? La sécurité des personnes, des idées, des lieux de débat peut-elle être laissée à la police seule ? Le DPS répondait à sa manière – brutale, contestée, mais structurée – à cette question. Son nom, son existence, son effacement même, racontent quelque chose d’essentiel sur les rapports entre politique, autorité et contrôle. Un mot à manier avec précaution, et à ne pas oublier.